Depuis longtemps je peins des « vides » où les profondeurs et l’intimité s’ouvrent au regard du spectateur. L’intérieur et l’extérieur (encore partagé par des espaces lesquels se trouvent à la surface plane du tableau) démontrent bien, que figure et abstraction ne se sont jamais opposées. Des tableaux de très grand format dégagent cette mystérieuse présence qui nous plonge dans la contemplation totale. Le travail avec des pigments et leurs liants me donnent cette liberté recherchée dans ma création. La texture fine, soyeuse, témoigne de cette virtuosité que j’affecte. 

Ma démarche de plasticienne est intimement liée au monde qui nous entoure. Après mes voyages en Palestine en 2003 et 2004 je peins une série de tableaux “Gaza”. Et je vais vers les vivants ! Et pour prouver cela, il faut regarder comment je peins les gens. Leur présence qui peut être reconnue comme intérieure, tout en permettant par son poids, sa matière, sa couleur, une possibilité très sensuelle, très matérielle, de l’éprouver.

J’habite avec ma famille à la campagne, mais je reste souvent dans les grandes villes, comme New York, Paris etc. J’ai eu de la chance d’avoir comme ami le peintre François Heaulmé. Aujourd’hui je suis dans un collectif d’artistes en Aveyron, la Borie des Arts. Comme je ne veut pas garder mon savoir pour moi-même j’enseigne et j’organise des expositions d’art contemporain pour d’autres artistes. 

Sculptures En visite chez le ferronnier. Je remarque des plaques d’acier lourdes qui me séduisent immédiatement. C’est une sorte de quadrillage de 2 cm par 2 cm qui laisse des vides. J’entrevois la possibilité de sculptures qui joueraient avec la transparence. Ces vides pourront être investis par l’autre, le spectateur. Il peut évoluer autour de la sculpture dans l’espace, mais il peut aussi la pénétrer ou la traverser : en écrivant sur des bouts de papiers ce qu’il souhaite, en insérant son petit rouleau de papier dans le quadrillage. Ces petits rouleaux resteront intégrés à la sculpture jusqu’à ce qu’ils disparaissent emportés par le vent ou détruits par le temps. 

Art de la transformation et de l’éphémère comme la vie. Ce beau matériau travaillé se redresse, comme l’enfant se redresse inexorablement quand il est temps pour lui de marcher. Les pieds sur la terre, la tête vers le ciel. Dans ce mouvement est l’intention de l’artiste. Mon intention est d’attraper un petit bout du Tout. Je vois mes sculptures installées à l’extérieur, en dialogue avec la nature, partie du Tout qui, désormais, existe avec tout ce que cela comporte d’aléatoire, comme dans la vie : le vent, la pluie, le vieillissement, la corrosion, le froid, le chaud, la nuit et le jour. La sculpture ainsi plantée dans la lumière projette son ombre. Elle fait écho à notre part de lumière et à nos zones d’ombre. La vie ne dure qu’un temps, la mort est au bout : ne nous laissons pas distraire de ce qui est essentiel nous avons autre chose à faire. La paix par exemple... 

La Main Des mains fortes, faites pour biner les légumes dans son potager, faites pour tirer des lignes calmes, lignes horizontales, mouvementées, tremblées, mais lignes qui continuent à intriguer loin à l'extérieur du tableau. L'ouverture Faut-il une bonne dose de mistral pour sentir le mouvement et le rythme ? En Aveyron, depuis une vingtaine d'années, c'est le vent du Sud qui traverse l'atelier situé au « Phare ». L'unité du tableau demande l'ouverture vers l'extérieur, par exemple par la coupure d'un rectangle hors cadre qui fait circuler l'air. 

Yuta forme et transfigure, mais elle n'imite pas la vie. Rien n'est systématique, rien ne rentre dans le moule, des choses simples comme la table, le bol, le vase peuvent se transporter sur plusieurs surfaces, mais aucun tableau ne ressemble à l'autre. Des hachures, des pointillées, des frottis extrêmes de plusieurs couleurs font partie d'une recherche de la composition 

Expositions V I S I O N S La vie ne dure qu’un temps, la mort est au bout : ne nous laissons pas distraire de ce qui est essentiel nous avons autre chose à faire. La paix par exemple… La paix peut-elle se faire sans œuvrer à sa propre paix intérieure ? La vie ne dure qu’un temps et ce temps est fait de toutes sortes d’ingrédients. La confrontation personnelle avec la maladie, la perte, la solitude remet sur le métier le sens des échanges entre les êtres humains, le doute, "ne demande pas ton chemin à quelqu’un qui le connaît sinon tu ne pourrais pas te perdre"… Tout cela revient sur la toile. Période de transition, expérimentations, du plein, du vide, du travail sur le travail. La technique va dans ce sens : impression sur la toile retravaillée, réserves dans la composition qui seront complétées par un autre matériau. Ces différents moments de l’exécution formeront finalement le tout du tableau. Et comme toujours, la lumière et la danse des couleurs qui nous rend l’espoir et l’envie de vivre. M.K. 

La peinture de Yuta Strega, est "Nuance", non pas comme une fin délimitant l'art, mais au contraire, comme une REVIVANCE de notre terre et de ce qu'elle supporte depuis le début. La peinture primitive débute par un trait soulignant un homme, un animal. L'ombre avant la figure, la peinture de Yuta est le prolongement naturel du trait et de l'ombre. Elle y rajoute la couleur, les couleurs, la nuance, les nuances … Sa peinture n'est pas objective, elle est subversive. Elle laisse au fil du temps des messages subliminaux sur les atrocités de la vie, en espérant le mieux, l'utopie, par ces mises en scènes chromatiques. Le sentiment est présent en permanence, mais il ne s'impose pas. Il est là, à nous de l'exalter et de le dispenser. J-P.R. 

Regarder un tableau de Yuta Strega, c'est rencontrer une sensation. Dès l'abord, indicible. Le regard attiré, aimanté, suit des lignes de brisure, s'attarde sur des plages de repos, explore des masses tourmentées, plonge dans la profondeur dense des couleurs. Au fil de cette exploration, un monde se dévoile, une cohérence surgit. La sensation s'affermit, s'affine, prend corps, emplit le corps d'une mystérieuse jouissance...C.C.